Fin des cookies tiers : vers un Internet moins publicitaire ?

#YZ Paris

Repoussée à 2023, la fin des cookies tiers prévue à l’origine pour 2022 par Google est au cœur de nombreux débats.

À différencier des cookies first-party généralement employés par un site pour conserver les données de session de ses utilisateurs (mot de passe, ID..), les cookies tiers sont utilisés par des sites externes afin de suivre un utilisateur d’un site à l’autre, et enregistrer ses données de navigation.

Ils sont généralement utilisés à des fins publicitaires, pour identifier les cibles les plus pertinentes pour diffuser une annonce.

Chez Apple également, le tracking publicitaire recule

Vous n’êtes sans doute pas passé à côté de la campagne d’Apple sur le sujet : on y voit un jeune homme suivi tout au long de sa journée par des commerçants. 

La firme à la pomme demande maintenant le consentement de ses utilisateurs pour activer l’IDFA (Identifier for Advertisers). Avec un taux d’activation de moins de 5%, le tracking publicitaire des utilisateurs d’une appli à l’autre se retrouve lui sévèrement amputé.

Il est cependant intéressant de noter qu’Apple elle-même n’est à priori pas concernée par ce processus de confidentialité … 

Qu’en retient-on ? 

D’une part, le risque d’un monopole sur le tracking au sein des plateformes par les entreprises propriétaires (dont Google avec Android) se pose.
D’autre part, qu’il n’existe qu’une infime minorité d’utilisateurs pour consentir à l’utilisation de leurs données à des fins publicitaires. 

Un challenge de taille pour les acteurs qui font le pari de la transparence avec le public pour obtenir la plus large part d’adhésion possible.

Une adaptation nécessaire pour les annonceurs

Prévue au départ pour 2022, la fin des cookies tiers devait impérativement être reportée pour laisser un temps d’anticipation aux annonceurs, et inventer de nouveaux modèles. L’avenir de la publicité en ligne n’est donc pas menacé, mais la question reste entière quant à la nature de ce nouveau paysage qui se dessine.

Si certains affirment que les nouvelles solutions publicitaires seront plus respectueuses de la vie privée des utilisateurs, la disparition du modèle commun laisse place à une effervescence de modèles originaux variant d’un acteur à l’autre, une disparité au sein de laquelle il sera plus difficile de naviguer :

  • Certains misent sur une appropriation des cookies first-party et autres données natives, 
  • d’autres proposent le “choix” à l’utilisateur entre un paywall et la cession de leurs données en échange l’accès au contenu souhaité, 
  • ou encore des solutions de ciblage contextuel, employant l’Intelligence Artificielle pour analyser le contenu d’un article plutôt que les données de ses utilisateurs, afin d’en déduire la thématique et d’y insérer les publicités correspondantes.

Vraiment la fin de la publicité en ligne ? 

D’ici à leur disparition du navigateur Google Chrome, la firme lance l’initiative Privacy Sandbox afin d’étudier les alternatives proposées sur des plateformes comme GitHub ou W3C :

Parmi elles, FLoC – ou Federated Learning of Cohorts – est une méthode d’identification et de regroupement des utilisateurs par Google Chrome en “cohortes” basées sur leurs habitudes de navigation. Les annonceurs pourraient alors cibler une cohorte rassemblée autour d’un même centre d’intérêt, de façon anonyme. 

Une autre proposition nommée Fledge (pour First Locally-executed Decision over Groups Experiment) délègue les enchères publicitaires au navigateur lui-même, une solution plus protectrice de la confidentialité des internautes.

Le pari de la créativité

Sur Internet, la publicité est de plus en plus perçue par les utilisateurs comme une nuisance, un bruit blanc intempestif qui perturbe la navigation. Le volume et l’intrusivité toujours croissants de ces contenus commerciaux poussent les internautes à une utilisation intensive d’outils de protection : adblockers, VPN etc.

Dans ce contexte de régulation, les publicitaires que nous sommes doivent remettre en question leur pratique. 

Non, ça ne sera pas la fin de la publicité en ligne.

Mais notre conviction repose sur une idée simple : séduire plutôt que contraindre, en repensant les contenus publicitaires et les messages transmis, plutôt que de maximiser leur distribution et “forcer la main” des utilisateurs.

Cette ère de la créativité que nous appelons de nos vœux est d’ailleurs soulignée par les plateformes sociales : selon TikTok, c’est 80% du ROI d’une campagne média qui passe par sa créativité (49% selon Facebook). 

Mettre l’accent sur de meilleures créations, qui transforment ce bruit blanc en véritable interaction, permet de booster les audiences des publications à moindre frais en comparaison du matraquage d’une idée qui ne convaint pas.

Pour renouer avec le public, avec ou sans cookies tiers, faisons le pari de la créativité.

Clément Roger
23 novembre 2021