Quand les rapports RSE deviennent des obstacles au progrès

#RSE

En France, les plus grandes entreprises ont l’obligation de rédiger un rapport RSE annuel et les moins grandes sont incitées à le faire. Pour les sociétés qui désirent diminuer leur impact, il représente une étape importante du parcours. Énergivore et moyennement efficace, il ne doit pourtant pas devenir un objectif, mais bien rester un moyen.

Le Reporting RSE, c’est quoi ?

Aussi connu sous le nom de Déclaration de performance extra-financière, le rapport RSE est un document périodique rédigé par l’entreprise qui l’oblige à questionner ses pratiques et à identifier les lacunes sociales, écologiques ou éthiques de son fonctionnement. À l’entreprise de fixer ensuite ses objectifs pour les réduire et, l’année suivante, d’en publier les résultats, en même temps que de nouveaux objectifs.

Puisqu’il est public, le document avait pour vocation de permettre au citoyen-consommateur de s’éclairer et, avec le jeu de la concurrence, d’enclencher un cercle vertueux de responsabilité au sein des entreprises. 

Est-il vraiment efficace ?

Pour beaucoup d’entreprises volontaires et de bonne foi, le reporting RSE est devenu le principal levier de la politique RSE. Dans ce cas, il est largement insuffisant : 

    1. Il n’est quasiment jamais lu : fastidieux à produire, il l’est aussi à feuilleter. Aux États-Unis, seulement 17% des américains déclarent avoir lu une partie d’un rapport RSE durant les 12 derniers mois. 
    2. Il ne suscite pas la confiance ni la conviction : les chiffres âprement calculés de ce type de rapport suscitent soit la suspicion, parce qu’ils n’ont pas toujours été contrôlés par un tiers, soit le scepticisme (qu’apporte au consommateur de savoir qu’un jean génère 49 grammes de phosphore ?), soit l’indifférence, face à des tonnes de données pas faciles à maîtriser pour le consommateur lambda.
    3. Il ne permet pas de comparer : parce qu’il n’est pas uniformisé chez toutes les entreprises, il est très difficile de confronter leurs résultats.
    4. Il conduit à diminuer ses objectifs : ce qui compte, ce n’est pas de promettre, c’est de réussir ses objectifs. Alors par peur de ne pas les atteindre, les entreprises, consciemment ou non, ont tendance à revoir à la baisse leurs ambitions. 
    5. Parce qu’il est énergivore : trop énergivore, surtout pour une petite structure, qui a plein d’actions à mener !

« L’impact du mouvement de mesure et de reporting a été survendu […] une approche plus agressive est nécessaire »  – Kenneth P. Pucker, CSO de Timberland.

Mais alors, que faire ?! L’exemple des baskets Veja

Le rapport RSE est un outil utile, notamment pour pousser sa réflexion sur son impact. Il ne doit devenir ni un objectif en lui-même, ni un frein. 

Le principal, ce n’est pas le rapport, c’est ce qu’il est censé contenir. 

Mesurer, étudier, perfectionner son activité, c’est possible, y compris sans son rapport RSE ! Veja le montre très bien, puisque sa réflexion est continue, complexe et qu’elle l’amène fournir des chiffres moins bons que la concurrence. L’entreprise choisit en effet d’inclure le Scope 3 dans son étude, c’est-à-dire les émissions de CO2 qui ne sont pas liées à la fabrication du produit, mais à l’ensemble de son cycle de vie (ex : fournisseurs, collecte pour recyclage, etc…).

 

 

« Si nous comparons nos résultats à ceux d’autres entreprises, nos émissions de CO2 sont élevées. Pourquoi ? Parce que nous avons tout pris en compte. » – Veja

Si vous sentez que le rapport RSE constitue une étape trop importante de votre politique RSE, qu’il vous aide à mener votre réflexion mais vous freine pour passer à l’acte, rien n’interdit de faire sans lui !

Quelques ressources : 

  • Un article très détaillé expliquant les limites du reporting RSE au sein de Timberland, en anglais : https://bit.ly/3gbRigr 
  • Un article documenté sur le manque d’intérêt des citoyens-consommateurs pour le reporting RSE : https://bit.ly/3gmKV8Z 
  • Le détail de l’initiative de Veja sur le calcul du carbone :  https://bit.ly/3xdnFRD 

Pour retrouver un de nos articles sur les embuches de la transparence : https://bit.ly/3gnOE68

Robert Vanherzeeke
28 juillet 2021